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Le confinement, ou l’exceptionnel à la portée de tous

L'exceptionnel Monsieur Tout-le-mondeLe confinement est une épreuve que la plupart d’entre nous n’aurait jamais cru devoir vivre un jour. Pour pouvoir le supporter, il faut de la patience, de la ténacité et de l’amour. A cet égard, et toutes proportions gardées, il évoque des situations extrêmes qui sont le quotidien d’individus hors du commun.

Voici quelques exemples de ces individus auxquels le confinement actuel m’a fait penser.

Les enfants-bulles sont des personnes dont les défenses immunitaires sont fortement affaiblies, voire inexistantes. Cela résulte le plus souvent d’une immunodéficience innée.

Le nom d’« enfant-bulle » trouve son origine dans le fait que ces enfants doivent vivre dans un milieu stérile et isolé au maximum de l’environnement extérieur afin de rester à l’abri des infections. Ils ne doivent jamais sortir au risque de contracter de graves maladies, et doivent prendre d’infinies précautions dans leur vie sociale.

Six astronautes occupent en permanence la station spatiale internationale ISS (International Space Station), pour des durées comprises entre trois et six mois (espérons que le confinement ne durera pas aussi longtemps !). La raison d’être de la station est de rendre possible des expériences scientifiques qui ne pourraient pas être réalisées sur Terre. Mais elle possède un autre intérêt : elle permet d’étudier la psychologie d’un groupe d’hommes et de femmes contraints de passer de longues semaines dans un environnement exigu, sans autres contacts. Evidemment, il n’est pas question pour eux de sortir, mis à part quelques sorties extra-véhiculaires. D’un point  de vue humain, cette situation n’est pas sans rapport avec le confinement auquel nous sommes astreints.

Les sous-mariniers de la Défense Nationale, qu’ils soient dans des sous-marins d’attaque ou dans des sous-marins lanceurs d’engins, passent de longues semaines isolés du reste du monde. Ils doivent s’adapter à un nouveau rythme, où ils travaillent par périodes de quatre heures ou “quarts”, et communiquent avec leurs proches uniquement par des moyens électroniques. Un peu comme nous en ce moment. A une différence près : les messages que les sous-mariniers reçoivent sont préalablement censurés par leur hiérarchie,  afin d’éviter que des mauvaises nouvelles ne sapent le moral de l’équipage. Dans notre cas, au contraire, nous sommes abreuvés en permanence des mauvaises nouvelles de l’épidémie par les médias.

On trouverait sans peine d’autres exemples.

Bien sûr, confinés dans notre domicile, notre existence quotidienne est bien moins dure que celle des personnes que je viens de citer.

Il n’empêche : lorsque nous serons lassés par la monotonie des jours qui vont s’égrainer jusqu’à la fin du confinement, nous pourrons nous projeter, par l’imagination, dans le quotidien de ces personnes exceptionnelles.

Désormais, contre toute attente, nous partageons tous, à un degré aussi infime soit-il, une partie de leur destin.

Des langues vivantes si loin, si proches

homme globe
homme globe

Comment des langues qui se sont épanouies dans des berceaux de civilisation distants de milliers de kilomètres peuvent-elles partager des points communs non seulement en matière de vocabulaire, mais aussi de grammaire ?

Ainsi, pourquoi les sonorités de “maman” en français, 妈妈 (“mama”) en chinois ou même أمي (“‘umi”) en arabe sont-elles si apparentées ?

Pourquoi les Français apprennent-ils à dire “papa” dès le plus jeune âge, les Russes папа (“papa”) et les Chinois 爸爸 (“baba”) ?

Les similitudes grammaticales sont encore plus incroyables.

Ainsi, dans un groupe d’Anglais, un individu pourra lancer une invitation collective à faire quelque chose par une tournure du type :

let’s watch a movie

(“regardons un film”)

let’s est la forme contractée de let us et :

let = “laisser, laisser faire, permettre”

us = “nous”

watch = “regarder”

a movie = “un film”

Et que dirait un Chinois ?

Il dirait :

让我们看一部电影。

(“rang wo men kan yi bu dian ying”)

Or :

让 = “laisser”

我们 = “nous”

看= “regarder”

一部电影 = “un film”

Autrement dit, les Chinois comme les Anglais utilisent une tournure du type : laisser + nous + action pour traduire le fait qu’un individu lance une invitation collective à faire quelque chose à l’intérieur d’un groupe (l’impératif présent avec “nous” en français).

Comment des civilisations aussi éloignées que celles des Anglais et des Chinois ont-elles pu aboutir à la même structure ?

Faut-il voir dans ces similitudes entre langues vivantes une trace de l’universalité de certains traits de la pensée humaine ?

L’art de boire, en Chine et en France

白酒
白酒

L’alcool est une composante de la vie sociale aussi bien en Chine qu’en France, mais avec de notables différences.

D’abord, on ne boit pas la même chose. Le vin est une valeur sûre en France, riche en vignobles et en tradition viticole. En Chine, les repas sont généralement accompagnés de 白酒 (bai jiu), littéralement “alcool blanc” ou “vin blanc”. Il s’agit d’alcool de sorgho, qui titre entre 35 et 53 degrés, dont les deux marques les plus célèbres (et les plus chères) sont Moutai et Wu liang ye.

On ne boit pas non plus dans les mêmes verres. Alors que la contenance d’un verre à vin est comprise entre 8 et 14 cl, un verre à baijiu est souvent tout petit, ce qui permet de multiplier les toasts.

Ce qui nous amène à la manière de boire en société. Il est de coutume, en France, de trinquer avec les autres convives ou de lever son verre en leur honneur, au début du repas. Ensuite, chacun déguste son verre à son rythme. Cela dénote, me semble-t-il, une dimension individualiste assumée dans le plaisir du vin. En France, on assume de prendre son verre et de le porter à ses lèvres en solo, de boire et d’y prendre du plaisir, au nez et à la barbe, si j’ose dire, de la personne que l’on a en face de soi.

Il en va tout autrement en Chine, où l’on ne boit pas seul. Il convient d’inviter les convives à boire avec soi, à chaque verre, et en respectant des priorités : trinquer d’abord avec celui qui invite, avec le chef, avec l’aîné, etc. En matière d’alcool, on ne prend pas son pied tout seul lorsque l’on est entouré. La manière de trinquer répond aussi à un décorum bien particulier. On se lève pour inviter une personne parfois située de l’autre côté de la table, on échange quelques mots, puis on fait cul-sec (干杯, ganbei, ou “verre propre”) avant de montrer ostensiblement à son interlocuteur que l’on a vidé son verre et de retourner à sa place, ou de poursuivre la tournée des toasts.

Après quelques années de pratique (oui, j’ai donné de ma personne !), j’apprécie cette façon de faire : on ne boit pas pour boire mais avant tout pour créer ou nourrir du lien social. Pour un occidental, toutefois, cette façon de boire peut manquer de spontanéité et ne permet pas de se détendre totalement. Elle conduit aussi, surtout lorsque les convives sont nombreux, à boire beaucoup plus, et à boire même quand on n’en a pas envie : on ne refuse pas un toast quand on y est invité. Mieux vaut ne pas prendre le volant ensuite !

Boire avec modération est bien difficile en Chine…

Semaine mondiale de l’entrepreneuriat

A l’occasion de la semaine mondiale de l’entrepreneuriat du 16 au 22 novembre 2015, j’ai eu l’idée de me présenter en une image.

A propos de Jérôme Delacroix
A propos de Jérôme Delacroix

Mes activités d’entrepreneur ont en effet 4 dimensions :

  • les démarches et les technologies de la coopération, au travers de mon blog Coopératique
  • le marketing de contenu, au travers de ma société Smartwords
  • le travail nomade, puisque je pratique aussi bien le télétravail, que le travail chez mes clients ou en centres d’affaires (je n’ai pas encore essayé la planche de surf !)
  • et tout ceci sur deux thématiques de prédilection : le marketing et les systèmes d’information (IT)

Pour en savoir plus sur toutes ces dimensions, vous pouvez me suivre sur mes différents comptes Twitter : @jdelacr, @cooperatique et @smartwords.

Bonne semaine de l’entrepreneuriat à tous !

Soeur Cristina : la subversion de la subversion

Pour ceux qui ne connaîtraient pas Soeur Cristina, il s’agit d’une nonne de la congrégation des Soeurs ursulines qui a remporté cette année la version italienne du concours télévisé The Voice. Dans son album éponyme, elle chante des tubes de la pop comme True Colors de Cyndi Lauper, Try de Pink, ou encore… Like a virgin.Lorsqu’une chanteuse nommée Madonna a sorti Like a virgin, en 1984, c’était de la provocation. L’artiste jouait bien sûr sur le champ sémantique catholique : la Vierge, la Madonne. C’était une forme de subversion parce que les paroles avaient une portée sexuelle : “like a virgin touched for the very first time“. Quel toupet !Au fil des années, Madonna est devenu une chanteuse sexy, provocante, qui n’aurait pas hésité, par exemple, à lancer dans l’assistance sa petite culotte lors d’un concert organisé à l’Hôtel de ville de Paris à l’initiative de Jacques Chirac.Et voilà qu’une religieuse, c’est-à-dire l’antithèse de la bombe sexuelle, se permet de reprendre le tube de la blonde Madonna. Quel culot ! A une époque où l’on se demande si les valeurs ne se sont pas inversées par rapport à la tradition chrétienne de nombre de pays d’Europe, la boucle est bouclée. Une femme ayant décidé de consacrer sa vie au Christ subvertit les symboles de la civilisation commerciale dans laquelle nous sommes plongés. C’est donc une subversion de la subversion : chapeau, l’artiste !

Et si on arrêtait de gaspiller l’énergie… sur Internet ?

 

Atomic gas
Atomic gas Creative commons : Dr.monster

Xavier de La Porte signe sur Rue 89 un papier intitulé “Décroissance : commençons par ne pas faire de recherche Google inutile”. Je ne suis pas un adepte de la décroissance : je ne crois pas que l’on doive se résoudre à vivre moins bien, à être moins riche, pour que la Terre dans son ensemble se porte mieux. Mais l’article donne une série de bons conseils (de bon sens) pour réduire la consommation énergétique inutile liée à Internet :

“changer nos usages : ne pas envoyer d’e-mails inutiles (c’est-à-dire parler à son voisin de bureau, ne pas mettre dix personnes en copies de nos mails ou forwarder à un tout un groupe une vidéo super lourde), ne pas passer par Google pour aller sur un site, mais taper directement l’adresse ou l’avoir inscrit dans les favoris, télécharger plutôt que regarder en streaming”

Et que d’énergie gaspillée, à l’échelle du monde, à tripoter nerveusement son portable dans le métro, dans la salle d’attente, à liker ou retweeter une “information” finalement sans importance. Eh oui, la cyberdépendance a un coût énergétique.

Et si nous utilisions mieux les possibilités infinies que nous donne l’Internet et l’Internet mobile en particulier ? Pour augmenter notre maîtrise sur nous-mêmes et sur notre environnement, plutôt que d’être esclave de la technologie.

Bien nourrir les maîtres

Robot majordomeHier soir, j’ai téléchargé un film sur une plate-forme légale : 5 euros la location d’un long métrage de 90 minutes. Tout s’est fait automatiquement : la navigation dans le catalogue de films, l’achat (la plate-forme a stocké mon numéro de CB dans sa base), le téléchargement sur la tablette…

Sur ces 5 euros, je sais que la plate-forme va encaisser 30%. 1 euro 67 pour un processus sans la moindre intervention humaine.

Pas étonnant qu’Apple (puisque c’est de cette plate-forme qu’il s’agit) soit aujourd’hui la première capitalisation boursière au monde. Ils ont su exploiter un modèle économique hors pair.

Quant à moi, je vais pouvoir consommer mon divertissement en conserve (qu’est-ce d’autre qu’un film ?) et m’endormir repus de cette alimentation culturelle consommée par des millions d’autres que moi. Nous ne mangeons pas encore tous du même bœuf cloné à l’infini mais les biens culturels numériques, eux, permettent ce miracle. Continuer la lecture de Bien nourrir les maîtres

L’autre élection

Les médias français sont tout occupés à commenter la victoire de François Hollande aux Présidentielles, et c’est bien naturel. Mais après avoir baigné pendant des mois dans un climat de campagne, et juste avant de nous replonger avec délices dans une autre campagne, celle des Législatives, il peut être bon de sortir le nez de l’Hexagone. Si l’on doit se réjouir de la vitalité démocratique, force est de constater que chez nos voisins grecs, l’expression populaire dans les urnes embarque le pays dans une voie bien périlleuse.

C’est ainsi que le parti d’extrême-gauche Syriza a devancé, aux élections d’hier, le Pasok (équivalent du parti socialiste) pour devenir la deuxième force politique du pays. Au total, d’après les dernières estimations, Syriza, KKE (parti communiste) et la Gauche démocratique (parti dissident de Syriza) totalisent 31,15% des voix ! Pour compléter le tableau, ajoutons que le parti néo-nazi Aube Dorée a obtenu 7% des voix et a fait son entrée au Parlement.

Autrement dit, les partis d’extrême gauche et d’extrême droite (et d’une extrême-droite radicale, c’est le moins que l’on puisse dire), ont recueilli près de 40% des suffrages.

Autant dire que la crise grecque ne paraît pas près de finir. Dans ce contexte international, notre nouveau président aura fort à faire…

De la mort d’une Levalloisienne au Caire aux caméras de surveillance à Paris

Le rapport, me direz-vous, entre le décès tragique d’une jeune fille de 17 ans au Caire et le plan visant à installer 1000 caméras de surveillance supplémentaire à Paris d’ici 2011 ?

Très simple : la violence des attentats, qui paraissait lointaine, prend une nouvelle acuité pour vous lorsque vous apprenez que quelqu’un, dans votre ville, a été touché. La prise de conscience se fait plus forte que la planète est petite et que la violence et la souffrance des uns peuvent vite devenir la souffrance des autres.

Alors pour lutter contre l’insécurité et les menaces terroristes, la mairie de Paris soutient le plan d’installation de caméras de télésurveillance, dans l’indifférence quasi générale. Mais jusqu’où sommes-nous prêts à laisser s’installer des atteintes possibles à notre liberté (atteintes possibles, pas avérées néanmoins) pour garantir notre sécurité ?

Il y a bien des collectifs qui se constituent pour dénoncer ce plan. Mais d’un autre côté, ces opposants, que proposent-ils pour assurer notre sécurité ?

Comment extirper les racines de la violence, seul moyen que nous ayons de pouvoir continuer à vivre en paix ?