Un enfant de 10 ans n’est pas un véhicule de mémoire

Le 13 février, Nicolas Sarkozy est intervenu au dîner annuel du Crif. Il a proposé que chaque élève de CM2 se voit confier, à partir de la rentrée scolaire 2008, la mémoire de l’un des 11.000 enfants juifs français victimes des camps nazis. Les élèves de CM2 feront “une petite enquête sur la famille, le milieu, les circonstances dans lesquelles l’enfant a disparu”, a précisé, le lendemain, le ministre de l’Education, Xavier Darcos.

Le vendredi, Simone Veil a qualifié cette proposition d’ “inimaginable, insoutenable, dramatique et surtout, injuste” et je souscris complètement à son analyse. Dans l’Express, elle explique : “On ne peut pas infliger ça à des petits de 10 ans, on ne peut pas demander à un enfant de s’identifier à un enfant mort, cette mémoire est beaucoup trop lourde à porter.”

Le même jour, à Périgueux, Nicolas Sarkozy a balayé ces objections : “Croyez-moi, on ne traumatise pas les enfants en leur faisant cadeau de la mémoire de ce pays.”

En l’occurrence, je lis plutôt dans cette proposition l’imposition du fardeau de la mémoire d’un enfant mort à un enfant d’aujourd’hui qui n’y peut mais. Et cela peut être traumatisant.

Pendant la campagne électorale, Nicolas Sarkozy avait été l’invité de l’émission d’ M6, “Cinq ans avec”. A la question (étrange au demeurant) qui lui avait été posée de savoir s’il avait déjà consulté un psy, il avait répondu posément que non, et que par ailleurs il n’avait jamais consulté d’astrologue non plus, ironisant sans doute sur l’attitude de feu le Président Mitterrand.

La mise sur le même plan de la psychologie et de l’astrologie est révélatrice d’un certain mépris. Je suis pourtant convaincu que si le Président Sarkozy était plus au fait de la psychologie, il n’aurait pas fait sa proposition.

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